L'ÉCOLE DU JARDIN PLANÉTAIRE
Le TussilagePar
Fabien Negrello Photos Floriane Karas- Le Journal de l'insoumission n°1796 mai 2025
Salut l’ami, je suis le tussilage. As-tu déjà remarqué mon allure singulière
? Regarde un peu le rayon de soleil miniature que j’incarne et qui s’en vient défier les derniers frimas de l’hiver. Mes fleurs jaunes, qui captent le regard, précèdent l’arrivée de mon feuillage en forme de cœur. Peut-être sont-elles impatientes de se montrer, de symboliser la fin de l’hiver, va savoir
!Lorsque mes feuilles apparaissent enfin, elles arborent un dessous duveteux d’un blanc argenté qui contraste avec le vert mat de leur surface supérieure. La légende raconte que les deux faces ont parfois des conversations secrètes, l’une murmurant la douceur, l’autre absorbant la lumière avec sérieux.Il arrive qu’on me donne le nom de «
Pas d’âne
». Ceci est dû à la forme de mes feuilles. Quand celles-ci se développent elles peuvent rappeler la trace d’un sabot. Je ne suis pas d’accord avec ça, je trouve que c’est oublier un peu vite la délicatesse de mes fleurs. Mais si, rappelez-vous, le rayon de soleil miniature
!Parlons un peu de mon tempérament. Je suis un conquérant discret des terrains délaissés. Je m’installe là où d’autres hésitent, colonisant les bords de chemins, les talus érodés, tranquille mais déterminé. Je suis également altruiste.En effet, en toute discrétion, je prépare le terrain, si j’ose dire, pour la venue d’une végétation plus luxuriante. Voyez en moi, une sorte de symbole du renouveau.Mon histoire avec toi est ancienne. Traditionnellement, les gens me prêtaient des vertus apaisantes pour les voies respiratoires. L’idée d’une fleur solaire apportant le calme aux bronches a quelque chose de poétique, tu ne trouves pas
? Cependant, la science a mis en lumière un état de fait
: la présence d’alcaloïdes pyrrolizidiniques. Ces derniers consommés en trop grande quantité, sont toxiques pour le foie. Ceci rappelle que même les dons de la nature nécessitent une utilisation mesurée et informée.Tu l’auras compris je suis bien plus qu’une simple herbe du printemps. Je suis comme une sorte d’énigme botanique qui défie les conventions temporelles de la floraison et de la feuillaison. Sous mon apparente simplicité se cache une chimie complexe, et mon rôle écologique discret n’en est pas moins essentiel. M’observer, c’est contempler une petite merveille de la nature, un rappel que la beauté et la prudence peuvent coexister dans le monde végétal. Ma présence éphémère au début du cycle annuel invite à la patience et à l’appréciation des premiers signes de renouveau, même s’ils se présentent sous une forme un peu... décalée. Je suis un peu une leçon subtile sur la complexité du vivant, où l’apparence initiale ne révèle qu’une partie de l’histoire.