15.01.24 - Des chercheuses et chercheurs de l’EPFL et de l’Institut Max Planck ont associé l’optique non linéaire et la microscopie électronique, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives dans l’étude des matériaux et le contrôle des faisceaux d’électrons.
Lorsque la lumière traverse un matériau, elle se comporte souvent de manière imprévisible. Ce phénomène fait l’objet d’un domaine d’étude à part entière appelé «optique non linéaire». Celle-ci fait désormais partie intégrante des progrès technologiques et scientifiques, depuis le développement des lasers et la métrologie des fréquences optiques jusqu’à l’astronomie des ondes gravitationnelles et la science de l’information quantique. De plus, ces dernières années, l’optique non linéaire a été utilisée dans le traitement des signaux optiques, les télécommunications, la détection, la spectroscopie, la détection de la lumière et la télémétrie. Toutes ces applications impliquent la miniaturisation de dispositifs qui manipulent la lumière de manière non linéaire sur une petite puce, permettant ainsi des interactions lumineuses complexes à l’échelle d’une puce. Récemment, une équipe de scientifiques de l’EPFL et de l’Institut Max Planck a introduit des phénomènes optiques non linéaires dans un microscope électronique en transmission (MET). À la place de la lumière, ce type de microscope utilise des électrons pour l’imagerie. L’étude a été menée par le professeur Tobias J. Kippenberg de l’EPFL et le professeur Claus Ropers, directeur de l’Institut Max Planck de sciences multidisciplinaires. Elle a été publiée dans la revue Science. Schéma de l’expérience. Des motifs lumineux spatiotemporels non linéaires dans un microrésonateur à base de puce photonique modulent le spectre d’un faisceau d’électrons libres dans un microscope électronique en transmission. Crédit: Yang et al. DOI: 10.1126/science.adk2489 Les «solitons de Kerr» sont au centre de cette étude. Il s’agit d’ondes lumineuses qui conservent leur forme et leur énergie lorsqu’elles se déplacent dans un matériau, à la manière d’une vague de surf parfaite traversant l’océan. Dans cette étude, on a utilisé un type particulier de solitons de Kerr appelés «dissipatifs». Ces derniers sont des impulsions lumineuses stables et localisées qui durent des dizaines de femtosecondes (un quadrillionième de seconde) et se forment spontanément dans le microrésonateur. Les solitons de Kerr dissipatifs peuvent également interagir avec les électrons, d’où leur importance cruciale dans cette étude. Les chercheuses et chercheurs ont formé des solitons de Kerr dissipatifs à l’intérieur d’un microrésonateur photonique, une minuscule puce qui piège et fait circuler la lumière à l’intérieur d’une cavité réfléchissante, créant ainsi les conditions parfaites pour ces ondes. «Nous avons généré divers motifs lumineux spatiotemporels non linéaires dans le microrésonateur piloté par un laser à ondes continues, explique Yujia Yang, chercheur de l’EPFL et directeur de l’étude. Ces motifs lumineux ont interagi avec un faisceau d’électrons traversant la puce photonique et ont laissé des empreintes dans le spectre électronique.» Puce photonique utilisée dans cette étude, montée sur un porte-échantillon de microscope électronique en transmission et équipée de fibres optiques. Crédit: Yang et al. DOI: 10.1126/science.adk2489 Plus précisément, l’approche a démontré le couplage entre les électrons libres et les solitons de Kerr dissipatifs, ce qui a permis aux chercheuses et chercheurs de sonder la dynamique des solitons dans la cavité du microrésonateur et d’effectuer une modulation ultrarapide des faisceaux d’électrons. «Notre capacité à générer des solitons de Kerr dissipatifs (DKS) dans un MET élargit le champ d’utilisation des peignes de fréquences basés sur microrésonateur à des domaines inexplorés», déclare Tobias J. Kippenberg. «L’interaction entre les électrons et les DKS pourrait permettre la microscopie électronique ultrarapide à taux de répétition élevé et la création d’accélérateurs de particules grâce à une petite puce photonique.» Claus Ropers ajoute: «Nos résultats montrent que la microscopie électronique pourrait être une technique efficace pour sonder la dynamique optique non linéaire à l’échelle nanométrique. Cette technique non invasive permet d’accéder directement au champ intracavité, ce qui est déterminant pour comprendre la physique optique non linéaire et développer des dispositifs photoniques non linéaires.» Les puces photoniques ont été fabriquées au Centre de MicroNanoTechnologie (CMi) et dans la salle blanche de l’Institut de physique de l’EPFL. Les expériences ont été menées au laboratoire de microscopie électronique à transmission ultrarapide (UTEM) de Göttingen. Autres contributeurs Centre pour les sciences et l’ingénierie quantiques de l’EPFL Nik Papageorgiou
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